dimanche 5 mai 2019

Les tribulations des femmes à travers l'Histoire Temps modernes : déceptions renaissantes

Née en Italie avec la redécouverte de l'Antiquité, la Renaissance gagne au XVe siècle l'ensemble de l'Europe occidentale. L'Homme (re)devient pour les érudits « la mesure de toutes choses » (Protagoras).

Les femme vont-elles profiter de ce nouveau regard porté sur la condition humaine. Que nenni ! Cet horizon si prometteur se traduit pour la gente féminine par un durcissement de ses conditions de vie dans nombre de domaines et, pire, par un recul de ses droits civiques.

Le foyer pour prison


L'Occident, au XIIIe siècle, est sorti d'une économie à dominante rurale et autarcique. Partout des villes, des foires, des marchands et des artisans généralement organisés en corporations. Les femmes y participent activement, parfois même en tant qu'entrepreneur ou maître artisan.

Mais dès la fin du « beau Moyen Âge » se fait jour dans toute l'Europe une tendance à les évincer des fonctions de responsabilité et de nombreux métiers. Les corporations, après leur avoir ouvert leurs portes, les renvoient dans leurs foyers. Trop faibles physiquement, trop libres dans leur couple, trop indociles...
Comme il ne suffit pas de les exclure des responsabilités, les corporations leur interdisent le droit de simplement pratiquer leur métier (...).

Renvoyées à la maison, les femmes doivent encore faire face à l'évolution de la religion qui, avec la Réforme protestante et la Contre-Réforme catholique, se montre plus exigeante moralement et donc plus suspicieuse à l'égard du beau sexe.

En 1514, la coutume officielle du Poitou introduit l'incapacité juridique de la femme mariée : elle ne peut plus signer de contrat sans l'assentiment de son mari. Cette disposition qui va se généraliser est empruntée à Ulpien, un juriste romain du IIIe siècle auquel on doit l'expression imbellicitas sexus ou « sexe faible » pour désigner la femme.

Dans les cours aristocratiques, les femmes font figure d'ornement, à de rares exceptions comme les régentes Catherine et Marie de Médicis ou les poétesses Louise Labé et autres Marguerite de Navarre. Quant aux femmes du peuple, elles sont la cheville ouvrière de leur foyer et c'est bien assez (...).


Si belle en ce miroir !

Les arts de la Renaissance en ont fait leur thème privilégié : on ne compte plus les portraits et poèmes célébrant les appâts des belles (...).
« Œil attrayant, œil arresté » (Mellin de Saint-Gelais), cheveux « gentement tortillés tout-au-tour de l'oreille »(Pierre de Ronsard), « tétin qui fait honte à la rose » (Clément Marot), toutes les parties du corps sont célébrées dans les blasons des plus habiles serviteurs de la rime (...).


« Que de plaisirs quand vous serez ma femme » ! (Molière, Don Juan)



Ne cherchez pas les femmes du Grand Siècle. Elles sont toutes dans les œuvres de Molière. De l'innocente Agnès élevée par son tuteur dans le simple but de l'épouser (L'École des femmes) à la paysanne Mathurine qui rêve de sortir de son milieu par un beau mariage (Don Juan), elles forment une galerie de portraits inégalée.

Molière lui-même n'épargne pas la gente féminine (...).

Servantes espiègles, entremetteuses cyniques, mères de famille bigotes ou épouses cupides, les femmes du théâtre de Molière témoignent à leur façon du principal sujet d'inquiétude de toutes à l'époque : le mariage.

Loin des prescriptions de l'Église, aristocrates, bourgeois et coqs de village ne respectent plus guère les prescriptions de l'Église sur le libre consentement des époux.

Dès leur douzième année, les adolescentes peuvent être forcées de rejoindre le toit d'un inconnu choisi par leurs parents. Pas question de laisser parler les cœurs : « Mariages qui se font par amourettes finissent par noisettes [disputes] » (proverbe cité par Brantôme, XVIe siècle) ! (...)


Les Lumières à la rescousse ?


Les moeurs changent lentement, très lentement, et la haute société se montre peu à peu plus compréhensive envers sa moitié féminine. En 1673, c'est un homme, Poullain de La Barre, qui  a commencé d'éveiller les consciences avec son ouvrage De l'Égalité des deux sexes où il dénonce le préjugé concernant une soi-disant infériorité de naissance : « L'esprit n'a pas de sexe […], les femmes sont aussi nobles, aussi parfaites et aussi capables que les hommes ». Révolution !

Montesquieu, au siècle suivant, n'en disconvient pas mais précise : « L'empire que nous [les hommes] avons sur elles est une véritable tyrannie, elles ne nous l'ont laissé prendre que parce qu'elles ont plus de douceur que nous, et par conséquent plus d'humanité et de raison », expliquant que « les forces seraient égales si l'éducation l'était aussi »(Lettres persanes, 1721).

Sa contemporaine Émilie du Châtelet lui donne raison. Issue de la haute noblesse, elle a pu s'initier aux sciences grâce à la bienveillance de son père et mener une existence pleinement libre jusqu'à sa mort en couches, en 1749, à 43 ans.

Mais son exemple ne suffit pas à changer les mentalités (...).

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